MONICA LEITE

Monica Leite

jeune homme de dos face à une fenêtre haute, photo en noir et blanc

Photo Sasha Freemind

La minceur : idéal de beauté ?

Pourquoi les femmes et en particulier les jeunes filles veulent être minces ?

Cette question trotte dans ma tête depuis des années. Contrairement à elles, je n'essaie pas de maigrir alors que d'après la "norme", je devrais perdre 20 kilos. J'ai alors voulu me pencher un peu plus sur un phénomène de société qui est devenu une doctrine moderne depuis les années 80.

Dans un premier temps, il faut différencier la minceur de la maigreur. En pratique, c'est exactement la même chose. La minceur et la maigreur signifient deux états similaires.

Seulement, la minceur a un côté positif et agréable. Dans l'inconscient collectif, être mince rend beau. Contrairement à la maigreur, qui elle a une connotation négative. Quand on parle de maigreur, on pense à l'anorexie, aux os apparents et au corps décharné.

Les femmes veulent être minces, pas maigres. C'est la conclusion à laquelle je suis arrivée.

Une distorsion de l’image qui peut conduire à des dérives des comportements alimentaires.

On parle souvent des diktats de la minceur, imposé par la mode et l'idéal de la femme objet, comme principal responsable de la maigreur des jeunes filles. En effet, d'après l'INSEE, en l'espace de 10 ans, les jeunes filles de 11 à 14 ans considérées comme maigres, ont quintuplé.

L'inconscient de ces personnes fragiles est imperméable à tout avertissement des médecins, psychologues et autres nutritionnistes sur les différents dangers de l'extrême maigreur ; extrême fatigue, ostéoporose, anorexie, boulimie, dépression, disparition des règles ou risque accru de fracture. Rien ne compte ; excepté être la plus similaire aux règles surréalistes de la mode qui entretiennent un idéal de la femme dans la minceur.

En France, les femmes restent les plus minces d'Europe avec les Suisses et les Italiennes. L'élégance à la française et le goût de la mode font que les femmes et les jeunes filles veulent rester minces pour être "trendy" (à la mode). Certaines marques, comme Abercrombie and Fitch fut un temps, refusent de commercialiser des vêtements de tailles supérieures à la taille 40.

dunes de sable noir, photo noir et blanc

Photo Jeremy Bishop

photo noir et blanc d'un dos nus d'une personne squelettique

Photo Olenka Kotyk

dunes de sable noir, photo noir et blanc

La grossophobie et le discours virulent anti-gros sont enracinés dans la société actuelle, car pour être belle et acceptée, on doit, nous les femmes, rentrer dans le moule de la beauté. Cette discrimination est aussi blessante et aussi acerbe que la discrimination envers les noirs ou les Juifs. Chacun peut être "grassouillet" peu importe ses origines sociales, raciales ou religieuses. Les jeunes se trouvent gros alors qu'ils sont en parfaite santé et qu'ils correspondent aux recommandations sanitaires des nutritionnistes. La définition de gros est différée sur des personnes qui ne le sont pas. Une aberration pour certains, mais la seule vérité d'un monde où toute personne veut ressembler à un idéal utopiste et imaginaire. Néanmoins, la dictature de la minceur est tenace. Elle persiste et signe un idéal de séduction qui se veut unilatérale. Soit nous sommes belles et minces, soit nous sommes rondes et moches. Ce critère s'invite même sur le marché du travail. En 2012, le professeur Francis Alain Guitton, psychanalyste et docteur en sciences de la communication a publié une étude sur "la responsabilité de l'entreprise privée dans le culte de la minceur et dans la dérive pré-anorexique de la femme active". À niveau égal, une femme belle et mince aura plus de chances d'être embauchée en particulier si le poste à occuper est en contact avec le public. Une généralisation de ce fait de société que dénonce le professeur Guitton et qu'il appelle "une dérive sociétale dangereuse". L'origine de cette pratique discriminatoire est que la minceur est aussi associée au contrôle de soi et au dynamisme, des qualités très appréciées dans le milieu professionnel.

On ne peut pas s'imaginer être un triangle dans un monde carré. La femme, en plus d'être un sexe faible, doit correspondre en tout point en un idéal véhiculé par les médias et les conventions. La femme doit être mince, belle, intelligente, une bonne mère, une bonne épouse et avoir une carrière professionnelle étincelante. En quoi la minceur est-elle synonyme de beauté ? Une femme pulpeuse ou pourrait-on dire bien en chair, peut-elle représenter la beauté ? La belle Marilyn est une pionnière dans les années 60. Vont suivre les chanteuses et actrices latines comme Jennifer Lopez, Salma Hayek ou Monica Bellucci. Actuellement, la chanteuse britannique Adèle est l'exemple même que les formes généreuses d'une femme ne sont pas un frein à une carrière musicale internationale.

Autre exemple : dans certaines civilisations, les femmes rondes sont jolies et recherchées par les hommes – la plupart des hommes africains ou les civilisations sud-américaines mettent en avant les formes généreuses chez les femmes. Donc, avec certitude, la femme pulpeuse est un symbole de beauté. De plus, le culte de la minceur a pris un certain revers depuis 2010, certaines célébrités comme Lady Gaga ou Rihanna affichent 10 kilos de plus sur la balance car les formes généreuses, c'est la nouvelle tendance du moment.

Si je fais la synthèse de ces nombreuses recherches sur la dictature de la minceur, un seul et unique mot me vient en tête : "diversité". Bien sûr. Car, si l'obsession de la minceur est toujours d'actualité dans les pays occidentaux et très industrialisés, on assiste depuis une vingtaine d'années à une évolution morphologique. Les rondeurs sont de plus en plus recherchées sans pour autant tomber dans l'accès et atteindre l'obésité. Mais cela est un autre débat ...

Photo Jon Tyson